Le hasard fait bien les choses [ft. Mésange Bleue]

Venin longeait la frontière du Clan des Bois avec une certaine perversité. Il guettait les patrouilleurs qui passeraient mais en restant bien au chaud dans la vallée du miel, lieu où il ne craignait pas d’être vu. Cela dit il ne devait pas être trop confiante, voir un solitaire si près de la frontière ne ferait plaisir à aucun Boiseux, il fallait donc ruser.

Ainsi  le rabatteur passait de buisson en buisson, gardant toujours un œil sur le territoire convoité. Il espérait bien voir une patrouille bien précise arriver, avec un jeune novice entre les pattes, un peu influençable et qui rêve de grandeur. Cela faisait un moment qu’il l’avait à l’œil, le guettait et il voyait bien que cet apprenti manquait d’attention dans son clan. Le but était de le trouver. A partir de ce moment la tâche serait facile, tout ce qu’il fallait était de l’attirer dans un coin loin de son groupe pour lui faire ses grands discours préconçus puis de le ramener à la Confrérie en lui promettant un bien plus bel avenir. Et s’il refusait… Il ne refuserait pas, Venin en était sûr.

Le confrérien continua à balayer la frontière des yeux, espérant bien voir apparaître une patrouille mais en vain. Le soir arriva et il décida de faire demi-tour, un peu frustré, il se dit qu’il reviendrait le lendemain. La tête basse, l’air dépité, il ne vit pas qu’une féline s’approchait de lui. Sans lever les yeux, il ne la remarqua que quand il vit ses pattes apparaître dans son champ de vision. Surpris il fit un pas en arrière et découvrit une guerrière rousse. Elle sentait très fort les bois et il conclut bien assez vite qu’elle faisait parti du Clan en question. Un peu honteux, il s’excusa, sans vraiment avoir envie de commencer à la discussion :

- Excusez-moi, je ne vous avais pas vu venir, j’espère que je ne vous importune pas. Je vais rentrer chez moi.

A peine debout, voilà que mon compagnon me faisait déjà une remarque. Me reprochant d'avoir mal fait quelques choses ou je ne sais quoi.. A force d'entendre des reproches, je ne les écoutais qu'à moitié. Seul Nuage de .. avait des répercutions sur moi. C'était le messager de notre relation assez compliqué. Mais il n'était pas là, sûrement en plein entraînement. Je tentais de lui faire un sourire et de m'excusais une énième fois avant de rejoindre le promontoire pour recevoir une patrouille, bien vite suivi par mon compagnon. Nous prenons soin de ne pas nous mettre côte à côte pour éviter d'être choisi ensemble. Mais manque de peau, Horizon Brumeux nous avait mis dans la même patrouille. Je soupirais longuement, regardant le sol avant de rejoindre le guerrier en traînant les pattes. Un troisième membre avait été appelé dans notre patrouille et devait prendre le leadership et donc faire le médiateur entre nous deux. Comme moi, il ne semblait pas ravi par son rôle du jour et nous forcer à marcher vite.

Nous nous séparons bien vite en arrivant près du terrain de chasse. Tout trois heureux de pouvoir se retrouver seul. Je trottinais vers la frontière, me disant qu'il y aura peu de chance de croiser Poil de Campagnol, lui qui détestait ce coin. C'est avec un sourire en coin que j'y allais au petit trop dans cette direction. Arrivée à destination, une odeur m'interpellait, celle d'un solitaire. Je changeais donc de but pour voir ce qui en retournait. Bien vite, je découvrais un petit félin bicolore de petite taille. Il sursautait en me voyant s'excusant bien vite avant de vouloir se dérober et partir. J'arquais un cil, répondant aussitôt :

"-Tu pars bien vite solitaire, pour quelqu'un qui n'a rien à se reprocher."

HRP:

-Tu pars bien vite solitaire, pour quelqu'un qui n'a rien à se reprocher.

Mince, il fallait qu’il tombe sur une inquisitrice. Venin leva ses petits yeux verts intenses vers la guerrière avec quelque peu de mépris. Il n’avait aucune envie de rester de le coin, trop frustré de sa défaite du jour et du travail peu fructueux de ses rabatteurs ces derniers temps. Il n’avait encore moins envie d’argumenter sur sa présence ici et sa culpabilité.

La boiseuse était un peu plus âgée que lui, dommage… Avec les jeunes il arrivait à jouer de sa prestance pour les faire déguerpir mais là, il savait bien que la guerrière se serait plus près du rire que du cri d’effroi. Il ravala donc sa colère et afficha un sourire bien forcé qui se voulait de lui apporter un peu sympathie pour faire baisser les soupçons de la guerrière.

- Ouh là je n’oserai jamais avoir quoique ce soit à faire avec un clan, regardez-moi, que ferai-je face à l’un de vos guerriers ? Vous-même pourriez me réduire en charpie en un rien de temps. Je ne m’occupe pas des affaires de clans et en reste le plus loin possible, vous savez nous autres solitaires, nous n’avons pas vraiment envie de défier les guerriers des clans.

A ces mots, il mit bien en évidence son manque indéniable de muscles et de taille pour montrer que même lui savait que défier un guerrier serait synonyme de signer son arrête de mort. Passer pour une victime était une très bonne technique, pour peu que cette guerrière soit aussi une mère elle aurait pitié de lui. Mais il savait bien que sa ruse ne suffirait pas, la guerrière ne partirait pas avant qu’il lui ait donné la raison de sa venue.

- Disons seulement que je suis un peu nostalgique par moment. Il fut un temps où je fus un clanique mais cette vie n’était vraiment pas faite pour moi et j’ai décidé de quitter mon clan. Alors quand la nostalgie de mon clan me revient, je viens observer les patrouilles, cela me rappelle quelques souvenirs. Mais si cela vous dérange, je ne le ferai plus.

J'étais méfiante, c'était certain. Mais j'avais bien remarqué qu'il n'avait pas attrapé de proies. Il n'y avait ni odeur de gibier dans le coin ni trace de repas prit sur le fil par le solitaire.. Mais tout de même, je me devais de vérifier ce qu'il fichait là. Peut être de l'espionnage ? Enfin bon.. Je ne voyais pas vraiment ce qu'un espion solitaire pouvait faire dans le coin. Il n'y avait rien. Rien que les clans et bon. Un solitaire n'aurait que faire de ses informations plus ou moins importantes.

Me jetant un regard mauvais dans un premier temps, il finissait par me faire un sourire en me disant qu'il n'avait rien à faire avec les clans au vue de sa carrure. Argumentant le faite que je pourrais facilement le mettre en pièce. Ce n'était pas totalement faux, j'étais plus expérimentée cela se voyait. Mais il n'avait pas besoin de se dénigrer tant. Il pouvait certainement me porter quelques mauvais coups..

Après m'avoir montré ses muscles maigrelets, il reprenait en me parlant de sa vie. Il était donc un ancien clanique qui avait, parfois, envie de retrouver l'ambiance de son clan. Et bien.. On en apprenait tout les jours. On découvrait des spécimens bien étrange. Je lui répondais aussitôt à sa question finale :

"-Si t'as envie de te promener fait le. Ne dépasse pas les frontières, c'est tout. Vu que t'était un clanique, tu sais bien comment on est, nous les guerriers stupides. On veut pas que quelqu'un dépasse les frontières."

J'avais un peu ironisé ma situation, me traînant d'imbécile. Cela était vrai en soi.. Par forcément pour mon cas, mais j'avais vu plus d'un guerrier taper avant de parler. Ce qui était idiot et n'aidait pas à se faire des alliés. Je reprenais ensuite, interpellait par son manque de musculature :

"-Tu devrais peut être essayer de t’entraîner un peu en combat à mon avis. Ca peut toujours t'être utile."

La guerrière resta pacifique, ironisant même les règles un peu strictes et bêtes des clans. Venin se détendit un peu, il faudrait vraiment qu’il y aille fort pour qu’elle l’étripe, d’ici là il aurait le temps de la voir venir. Pour autant la guerrière reprit :

-Tu devrais peut être essayer de t’entraîner un peu en combat à mon avis. Ca peut toujours t'être utile.

Venin baissa humblement la tête, c’était un conseil sage pour un solitaire, bien moins intéressant pour un rabatteur cependant. Cela dit le confrérien repensa à sa dernière entrevue avec Loup Arctique et se dit, tout en jetant un coup d’œil aux cicatrices que lui avait laissé son frère, que finalement il aurait bien apprécié d’avoir quelques notions de combat. Pour autant il ne pouvait pas trahir sa couverture de solitaire.

– Vous savez, même du temps où j’étais un clanique, le combat n’a jamais été mon fort. Je pense que ça n’a jamais été fait pour moi, ma mère n’était clairement pas bâtie pour le combat et mon père… Enfin je pense que ça se voit.

Il montra clairement sa petite taille et ses récentes cicatrices qui sous-entendaient qu’il n’était pas bon combattant.

– Disons que je pars du principe qu’en voyant ma carrure, mes assaillants auront pitié de moi… Mais peut-être ai-je tort ?

J'avais dit cela pour son propre bien. Il était toujours mieux d'avoir un peu de bagage dans tout les domaines. Cela permettait de pouvoir subvenir à ses besoins et ceux de ses proches en cas de besoin. Le solitaire se jetait un regard de long en large, détaillant sa propre pelisse comme si cela était la première fois avant de me regarder de nouveau et m'apprendre qu'il n'était pas doué en combat même au temps où il était encore dans les clans. Me parlant ensuite de la constitution physique de ses parents pour appuyer cela. Il n'était pas fait pour combattre et le serait jamais selon lui. Pour toute réponse, j'haussais les épaules. Si il le pensait, je ne pouvais pas lui dire le contraire. Nous n'allons pas nous fâcher pour si peu. Il continuait en me montrant dans un premier temps ces cicatrices avant de reprendre en m'expliquant qu'il partait du principe que sa carrure éloignait les bagarreurs. J'haussais de nouveau les épaules avant de lui répondre ce que je pensais de son raisonnement :

"-Tu sais.. Peut importe ta carrure. Si tu vas dans certaines zones, qu'elles soient aux solitaires ou aux claniques, ta carrure peu imposante ne t'empêcheras pas de recevoir des coups."

J'étais d'humeur généreuse et voulais faire ma bonne action du jour. Il n'avait clairement aucune notion de combat ou quasi aucune. Je lui proposais donc gentiment une solution :

"-Si jamais t'as besoin d'une petite leçon.. J'ai un peu de temps à tuer. C'est toi qui voit."

La guerrière haussa des épaules, visiblement peu convaincue par le raisonnement bancal de Venin et lui annonçant que ce n’était pas le physique ridicule du félin qui l’épargnerait à tous les coups. Le bicolore dut s’avouer qu’il n’avait pas vraiment choisi le meilleur argument, surtout au près de ces claniques prêts à sauter sur tout ce qui bouge pour une longueur de queue de territoire. Il fit une moue traduisant qu’il n’était lui-même pas sûr de ce qu’il avançait avant que la guerrière reprenne :

– Si jamais t'as besoin d'une petite leçon.. J'ai un peu de temps à tuer. C'est toi qui voit.

Venin sonda la guerrière avec un air ahuri. Depuis quand les claniques faisaient ainsi le don de soi ? Il fallait que cette rouquine soit vraiment sûre d’elle pour s’octroyer le droit d’entraîner un solitaire au combat. Il leva un sourcil et s’exclama :

– Vous feriez ça ?! Je croyais que les claniques n’aimaient pas savoir les solitaires en capacité de se défendre.

Il la défia gentiment du regard, les yeux plissés d’amusement et ronronnant comme le ferait un bon solitaire à qui on offre la chance de savoir se battre. Mais au fond de lui, Venin était surtout intrigué par cette femelle. Depuis le début, elle avait semblé différente de la caricature dont se faisait le rabatteur des guerriers. Pourtant, si le Clan des Bois n’étaient pas aussi borné que celui des Ténèbres, il n’en était pas moins un clan assez xénophobe lui semblait-il. Cette minette l’intriguait de plus en plus et il devait bien s’avouer que s’il retombait sur la route de Loup Arctique un jour ou bien même pour protéger sa propre peau à La Confrérie, un petit entraînement ne serait pas de trop.

– Enfin cela dit je suppose que vous avez raison, quelques réajustements de mes techniques de combat ne peuvent pas me faire de mal.